Noir et Rose

Noir et Rose

Por Georges Ohnet

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Sinopsis

Extrait | I À Dieppe, dix heures venaient de sonner à l’horloge de l’Hôtel de Ville, lorsque la grille du jardin d’une des plus luxueuses maisons de la rue Aguado s’ouvrit, livrant passage à une jeune miss, grande, élégante, blonde, le visage rosé éclairé par deux yeux d’un bleu candide, vêtue d’un joli costume marin avec des ancres au col et des galons d’or aux manches. Derrière elle, sortit une respectable lady habillée de soie noire, coiffée d’un chapeau cloche en paille tressée, et portant deux ombrelles et une jumelle marine. La jeune miss aspira l’air vif et salé, frappa le sol de son pied chaussé d’un soulier verni à talon plat, et dit: –Joli temps! Harriett! La respectable lady, qui était visiblement une gouvernante, agita la tête, poussa une espèce de hennissement approbatif, et, de son coude pointu, éperonnant son élève, se dirigea vers le port. La mer était d’un gris glacé de rose, doux comme une opale, le soleil fondait les petits nuages légers qui moutonnaient dans le ciel clair, une brise fraîche, venant du large, balançait les tiges fines des tamaris et faisait claqueter les drapeaux qui décoraient la grande porte des hôtels. Sur la pelouse brûlée par l’été, foulée par le passage des baigneurs, et rouge comme un vieux paillasson, les marchands de chiens promenaient en laisse, pêle-mêle, des meutes de lévriers, de bassets et d’épagneuls. Des jeunes personnes en jersey et des gentlemen en veston de flanelle jouaient au lawn-tennis, pendant que des babies blonds, aux jambes nues, enlevaient au bout d’une longue ficelle un cerf-volant en forme de chauve-souris. Le petit tramway, qui fait le voyage du Casino à la jetée, passait au trot d’un cheval somnolent. Et, criant à tue-tête, des gamins du Pollet offraient aux passants le programme des courses. Marchant d’un pas rapide, les deux promeneuses étaient arrivées à la hauteur de l’hôtel Royal, lorsqu’un grand jeune homme, sortant de la cour, la tête basse et l’air absorbé, faillit les heurter au passage. Il porta la main à son chapeau, s’excusa avec un léger accent étranger, et se rangea contre le mur. Une exclamation de la jeune miss lui fit lever les yeux, son visage pâle se colora d’une ardente rougeur, ses yeux noirs étincelèrent, et, frappant ses mains l’une contre l’autre, avec une stupeur mêlée de joie: –Daisy! Vous! C’est vous?..|

Georges Ohnet